- HARTUNG (H.)
- HARTUNG (H.)HARTUNG HANS (1904-1989)L’abstraction lyrique aura été au moins une fois inventée par un seul homme pour son propre usage. Tel est le sens de l’étrange carrière de Hans Hartung. Né à Leipzig de parents mélomanes et même musiciens amateurs, préoccupé d’abord de sciences et de philosophie, il s’oriente vers la peinture à Dresde en 1921-1922, en s’inspirant de l’expressionnisme ambiant. Très rapidement, il dissout l’objet dans des aquarelles informelles exécutées en totale ignorance du développement de l’art abstrait à la même époque. En 1924-1925, plutôt que de continuer ses études au Bauhaus, il préférera suivre un enseignement traditionnel, voire académique. Il assiste à une seule conférence de Kandinsky, qui ne paraît guère l’avoir influencé. Mieux même, il étudiera le cubisme en l’imitant, après son premier voyage en France (1926) qui marque pour lui la découverte de l’art non allemand. En 1932, il abandonne le cubisme lors d’un séjour aux Baléares. Alors commence ce qu’il n’est pas exagéré d’appeler son aventure politique: il apprend que ses biens sont bloqués à Berlin, regagne cette ville, mais n’y supporte pas l’atmosphère du nazisme vainqueur, et, en 1935, il s’enfuit presque clandestinement en France. Il exposera jusqu’à la guerre au Salon des surindépendants ses premières Toiles T , notamment celles qui constituent la série des Taches d’encre . En 1939, il s’engage comme volontaire dans la Légion étrangère et la rejoint en Afrique du Nord en 1942, après avoir été interné en Espagne. En 1944, il est grièvement blessé devant Belfort, et on doit l’amputer d’une jambe. Quand il se remet à peindre, en 1945, ce solitaire trouve enfin la récompense de ses efforts. L’expansion de l’art abstrait accueille son style tout personnel, aux variations peu nombreuses: vers 1947, tracés à grands coups de pinceau souple sur des champs, inégalement colorés; vers 1956, structures superposées donnant une impression de volume; vers 1961, grattages dans l’épaisseur de la pâte; vers 1965, immenses taches sombres sur des toiles de grands formats; vers 1970, aplats de couleurs variées et opposées, quelquefois filiformes, plus ou moins marquées par le noir. Les œuvres des années 1980 sont plus végétales, plus aquatiques; certaines évoquent l’intérêt qu’éprouve Hartung pour l’astronomie, d’autres montrent que Hartung a beaucoup pratiqué la photographie à la fin de sa vie. Grand Prix de peinture de la biennale de Venise en 1960, Hartung doit peut-être autant sa célébrité à ses gravures, rigoureusement abstraites, au tracé aigu et serré.Sa peinture, qui présente toujours l’apparence de la spontanéité, est en fait le fruit d’une méditation prolongée qui l’apparente à la fois à la calligraphie extrême-orientale et à la tradition puissamment dynamique de la peinture allemande. Cet effort renouvelé et toujours personnel représente un cas limite d’introspection métamorphosée en traces de l’universel.
Encyclopédie Universelle. 2012.